Tout ça pour ça : la triste fin du N85U

Si il est un avion qui a bien survécu à la fin des missions de guerre en 1945, c’est bien le Catalina, dans ses différentes versions. Non seulement la fin du conflit ne l’a pas privé d’une longue carrière militaire sous différentes cocardes, mais sa reconversion dans le monde civil n’a pas été trop compliquée. Là où un avion amphibie rustique, efficace et avec une grande autonomie pouvait être utile, le Catalina avait sa place. Il fut donc avion de ligne, cargo, avion d’exploration ou long-courrier personnel, tandis que d’autres devenaient pompiers du ciel.

Démonstration en vol et largage du N85U à Hoak Harbor, près de la base de Whidbey Island dans l’État de Washington, en septembre 2009. (Photo : Tucker M. Yates/U.S. Navy)

Le N85U

Ce fut ainsi le cas du N85U un PBY-6A (BuNo 64041) construit pour l’US Navy. Il sert sous l’uniforme jusqu’en 1958 où il est revendu en surplus à ACE Flying Service pour devenir un avion d’épandage agricole. L’année suivante, il est repris par Rosenbalm Aviation en Oregon et transformé en bombardier d’eau. Ensuite, il vole pour Sonora Flying Services, Burson and Associates et arrive chez Flying Fireman en 1979. En 1988, il est revendu à Awood Air. A la fin de ses contrats de lutte contre les feux, il demeure en état de vol et devient un « warbird » très prisé dans les différents Airshow de l’ouest des USA. D’ailleurs, l’association qui l’exploite reprend le nom « Flying Fireman » de son ancienne compagnie.

En 2015, il est choisi pour participer au tournage d’un film de guerre racontant le destin tragique de l’équipage du USS Indianapolis, torpillé en 1945 après avoir livré la bombe d’Hiroshima à Tinian. Il doit jouer le rôle de l’avion venu au secours des quelques naufragés et qui a sorti une cinquantaine de marins des eaux infestées de requins où ils tentaient de survivre depuis 4 jours (1). Le N85U est donc repeint en gris pour ressembler à un Catalina militaire.

Le tournage, sous la direction de Mario Van Peebles, débute le 19 juin à bord du cuirassé USS Alabama, préservé à flot près de Mobile. Le 27 juin, des scènes sont tournées sur une plage située à seulement une soixantaine de kilomètres, à Orange Beach. Le N85U, qui a effectué le long convoyage depuis l’état de Washington où il est normalement basé, entre alors en scène, piloté par Fred et Jayson Owen.

Le 29 juin, l’avion est victime d’une panne moteur et se pose au large de la plage voisine de Flora-Balma sur Perdido Key. Il est ensuite remorqué vers le rivage. Le tournage est alors interrompu pour laisser la place aux opérations de sauvetage de l’avion.

Légèrement endommagé, ce dernier a quand même pris l’eau et, très nettement alourdi, ne peut être mis au sec sans moyens techniques importants. Pendant plusieurs jours, il devient donc l’attraction principale des touristes fréquentant la plage. Des pompes sont mises en route pour tenter de l’alléger au possible.

Le N85U « beaché » sur la plage de Perdido Key, à quelques km de Pensacola. (Photo: Gulf Coast News)

Plusieurs tentatives sont ensuite menées pour le sortir de l’eau mais sans qu’elles puissent aboutir. L’une d’elle, le 3 juillet, est effectuée avec deux tracteurs depuis la plage. elle est d’ailleurs interrompue après qu’une sangle a cédé brutalement.

Le lendemain, on tente de sortir l’avion verticalement de l’eau pour le poser sur une barge mais le fuselage qui contenait encore beaucoup d’eau cède au niveau des sangles de levage. L’avion se brise d’un coup en plusieurs parties. C’est la fin du N85U.

3 juillet 2015, la tentative de levage du N85U vient d’échouer. (photo : DR)

Il s’agit d’une faiblesse pourtant bien connue du Catalina. Plusieurs avions, à moitié coulés, ont été ainsi détruits en tentant de les sortir de l’eau parce que devenus trop lourds. Ce fut d’ailleurs le cas pour un avion de la Protection Civile, le Pélican Rouge F-ZBAR, accidenté le 4 juillet 1964 lors d’un écopage sur le canal de Donzère et détruit lors des opérations de récupération.

The mangled remains of PBY-6A N85U after being moved to the USS Alabama Battleship Park Museum in Mobile, AL Photo: via Heijo Kuil

Les restes du N85U entreposés au Memorial Park de l’USS Alabama à Mobile (FL) quelques semaines après l’accident. (Photo : AL)

Tout ça pour ça :

Le film USS Indianapolis, men of courage sort aux USA en octobre 2016. Il est éreinté par la critique dès sa sortie, ce qui se double d’un échec public puisqu’il ne rapporte que 1,5 millions $, un peu juste pour un film qui en a coûté 40 !

Rien qu’en regardant l’affiche, on sent que la production n’a pas donné toutes ses chances à son produit.

Il s’agit d’un navet de plus à mettre « au crédit » de Nicolas Cage qui semble s’être fait une spécialité du genre depuis de nombreuses années.

Le film n’arrive même pas à égaler l’intensité du récit du drame par Robert Shaw dans les Dents de la Mer. (F. Scheck)

Le film n’est pas totalement non- regardable, il est juste totalement sans intérêt. (2) (G. Kenny)

Si malgré ça vous décidez quand même de le regarder, bravo, vous méritez bien le sous-titre du film, vous êtes un « homme de courage ! » (usoska/AlloCiné)

En France, il n’a même pas bénéficié d’une sortie en salle : il a été marqué du sceau de l’infamie cinématographique qui se résume en trois lettres : DTV : Direct To Video !

Ce n’est malheureusement pas la première fois qu’un avion précieux est détruit au cours du tournage d’un film historique. On se souvient que le Memphis Belle de Caton-Jones, en 1989  avait été marqué par la destruction au décollage du F-BEEA, un B-17 appartenant encore à l’IGN. Une perte là aussi inestimable. Seule maigre consolation, ce film, en dépit de quelques exagérations, était tout à fait respectable, ce qui ne semble pas être le cas du tournage pour lequel le N85U a été sacrifié.

Selon les spécialistes, il resterait, dans le monde, 14 Catalina en état de vol et toujours immatriculés. Sur ces 14 avions, 10 sont d’anciens bombardiers d’eau mais peu ont conservé leur soute de largage. Le N85U était donc un des derniers et sa perte en des circonstances aussi ridicules n’en est que plus lourde.

 

(1)  L’épave de l’Indianapolis a été localisée le 19 août 2017 par une expédition menée par Paul Allen.

(2) J’ai profité d’une diffusion télé pour le voir et confirmer que les critiques émises à son encontre sont assez justifiées !

 

article corrigé le 7 août 20020

 

Autorisation de décollage

Olivier Claux est aujourd’hui commandant de bord à Air France après avoir été successivement pilote privé, concurrent du tour de France des jeunes pilotes, pilote d’avion remorqueur pendant son service national, pilote d’aviation d’affaires, instructeur et enfin pilote de ligne, d’abord sur ATR chez Air Littoral et enfin à Air France sur A320 puis sur A330 ; un beau parcours.
Cet ouvrage est l’occasion, pour lui, de raconter son itinéraire par le biais de nombreuses, et très souvent savoureuses, anecdotes vécues. (…)

 

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Le largage du Firestar Tanker 16

Le 1er septembre 2002, une année qu’il sera difficile à oublier pour les équipages des tankers US, vers midi, les adeptes d’un culte sataniste procèdent à un sacrifice d’animaux dans un coin isolé près de l’extrémité nord de la Highway 39, dans un canyon au cœur des San Gabriel Mountains, en pleine Angeles National Forest. Cette chaîne de montagnes, à une cinquantaine de km à vol d’oiseau de Los Angeles, est impressionnante avec son sommet, le Mont Baldy, culminant à 3000 mètres. C’est aussi une « recreational Area » très appréciée en cette fin d’été. Mais la chaleur de la saison passée a rendu la végétation particulièrement sèche. Les bougies allumées autour du site rituel finissent par déclencher un incendie.

Le « Curve » Fire, le 1er septembre 2002, quatre heures et demi après son éclosion. (UCLA)

L’alerte est donnée vers 12h30 alors que le feu ne fait que 5 acres (environ deux hectares). Lorsque les premiers véhicules arrivent, une heure plus tard, le feu s’est étendu et a déjà parcouru 300 acres (120 hectares) et se développe d’une façon incontrôlable.

Les autorités locales et les pompiers prennent la décision d’évacuer 7000 personnes se trouvant alors autour de Crystal Lake et plusieurs secteurs sont immédiatement fermés au public. Plusieurs hélicoptères bombardiers d’eau lourds sont alors demandés dans le secteur, ainsi que les tankers du California Department of Fire et de l’US Forest Service.

Parmi ces derniers un Neptune, le Tanker 16 de la compagnie Aero Union, effectue un largage au ras des flancs d’une colline, devant un photographe qui couvrait les opérations de lutte contre ce qui était en train de devenir un incendie majeur. Lorsque la photo est développée, elle est rapidement diffusée car elle se révèle vraiment extraordinaire.

Le largage du Tanker 16 le 1er septembre 2002 sur le Cover Fire. (Photo authentique de Leo Jarzomb)

15 ans plus tard, cette photo est toujours considérée comme la plus impressionnante photo de tanker jamais prise. Composition, cadrage, action, elle est juste stupéfiante !

Elle est si extraordinaire que beaucoup pensent, encore, qu’il ne peut s’agir que d’un vulgaire montage. Et pourtant, la réalité derrière cette photo exceptionnelle est tellement plus simple.

A l’époque, Leo Jarzomb était photographe au sein de la rédaction du quotidien San Gabriel Valley Tribune. Averti du départ du feu, il s’était rendu sur les lieux pour photographier les opérations de secours. Il était donc en train de travailler lorsque l’avion s’est présenté pour le largage. Sur son appareil argentique, il avait monté un objectif à longue focale lui permettant des cadrages serrés à longue distance. La photo a été publiée dans son journal le 3 septembre et le 5, deux jours plus tard, elle était reprise par USA Today.

Tanker 16 d’Aero Union, profil de Cyril Defever

Le 1er septembre 2002, l’équipage affecté pour la saison sur le Tanker 16 était constitué de Brent Conner, 46 ans à l’époque, et de Jason Carter. Si ce dernier n’était alors qu’un jeune pilote, récemment embauché pour la saison et faisant ses premières heures de vol comme pompier du ciel, son commandant de bord était pour le moins expérimenté.

Brent Conner a appris le métier de pilote du feu très tôt et sur un avion mythique !

« J’ai eu la chance de grandir au sein des pompiers du ciel. Mon père avait un B-17 et un PV2 Harpoon. La première ligne de mon carnet de vol, c’est un B-17. Mon premier feu, c’était en juin 1973 en copilote de mon père à bord du Tanker 17, un B-17 appartenant à Aero Union.  J’avais  trente ans d’aviation agricole et autant comme pompier (NDT : en 2002). J’ai volé comme copilote sur B-17 et C-119 puis comme commandant de bord sur P2V, SP-2H, DC-4, DC-7, P-3 et maintenant sur MD-87  » (1)

Alors détachés sur l’aérodrome de Fox Field à Lancaster, dans l’est de Los Angeles, ils opéraient dans le cadre d’un contrat fédéral avec l’US Forest Service attribué à leur compagnie, Aero Union.

Ce vol était une opération classique. Mis en alerte, ils ont décollé chargés de retardant et ont rejoint la zone de l’incendie. Là, ils sont pris en compte par leur guide, un avion léger et chargé de les amener rapidement et en sécurité là où leur largage est demandé. L’usage de ces Lead Planes est systématique aux USA car son pilote prend à sa charge la reconnaissance du secteur, la détection des éventuels obstacles et la sûreté des trajectoires d’approche et de sorties de la passe de largage.

Brent Conner n’a pas oublié le jour où il a été photographié en action :

« C’est impressionnant comme cette photo reste au cœur des débats dans l’opinion publique. Je pense que c’est la photo de Tanker qui a fait le plus parler, en bien ou en mal, en fonction des opinions des uns et des autres.

La photo n’est pas truquée, le photographe a juste réussi à être au meilleur endroit.

On suivait Mike Lynn, je pense qu’il était « Lead 55 » (NDT : son indicatif). La visibilité était médiocre en raison de la fumée donc on s’est rapproché de lui et on l’a suivi dans son circuit jusqu’à tangenter une colline au cours d’un virage serré à droite en finale, tout en descendant le long du flanc pour le largage.

La photo est prise juste au moment où on tourne à droite en descendant la falaise. On avait aussi un bon vent arrière et même si on a l’impression que le retardant est en train de tomber sur le sommet, il a, en réalité, atterri à environ deux envergures du bas de la colline (NDT : 60 mètres) si je me souviens bien. Il n’y avait rien de compliqué ou de dangereux sur ce largage, il n’y avait pas d’énormes facteurs de charge ni de vitesse trop importante pour cette passe. On devait rester assez près du flanc de la colline parce que sinon, on aurait eu un largage trop haut et inefficace (…).

J’ai toujours dit que si ça avait été un largage dangereux, les gars sur la photo auraient été en train de courir plutôt qu’à rester plantés comme ça pour profiter du spectacle. » (1)

Le pilote du Lead Plane, ce jour là un Beech King Air, était donc Mike Lynn. Surnommé le Fire Pirate, c’est un personnage haut en couleurs et incontournable de la profession. Il est unanimement apprécié par les équipages avec lequel il a travaillé et dont il a, depuis longtemps, gagné le respect par son professionnalisme.

Un des Beech 200 sur lequel Mike Lynn a officié en tant que Lead PLane. (Photo : Firepirates.com)

Il n’a pas oublié non plus cette opération :

« C’est juste ! J’étais le Lead Plane bien que d’autres ont prétendus l’être. Nous essayions de rester au-dessus du torrent qui serpentait en dessous de nous. Le largage a commencé là mais il a parcouru une bonne distance avant d’atteindre le sol. (…) J’ai fait larguer « Denno » (2) juste derrière Brent, même largage. (…) ça semble proche, en effet, mais c’était en toute sécurité quand même !

Nous avions contourné le relief pendant toute l’approche et nous avons commencé à descendre le long de la colline en nous battant avec le vent pour contrôler notre vitesse.

J’étais dans un King Air et Ken Perry était en place droite.

Je me suis fait encore engueuler par Tony Kern (3), mais ce largage était parfaitement sûr. » (4)

Le Tanker 16, un ancien P2V-7 (SP-2H ; msn 7065 ex-BuAer 140963) Neptune de l’US Navy avait été acquis par Aero Union en 1986. Il avait été converti à la fin des années 80 en Firestar par l’adoption d’une soute à retardant moderne, le premier système « constant flow » mis en service. L’avion était également débarrassé de tous les systèmes et aménagements inutiles pour sa nouvelle mission. Il était si allégé que le constructeur a pu également supprimer les deux réacteurs d’appoint pour ne conserver que les deux moteurs en étoile, devenus suffisants, ce qui constituait un gain de maintenance non négligeable.

Le Firestar disposait donc d’une bonne puissance, d’une manœuvrabilité très appréciable et d’un système de largage performant.

Le Tanker 16 à Redding en 1992. (Photo René J. Francillon)

Quatre de ces avions sont produits (Tanker 01, 03, 16 et 18). En 2001, le 03 est vendu au Chili où il vole quelques saisons avant d’être arrêté de vol, stocké et un peu laissé à l’abandon sur l’aérodrome de Carriel Sur, près de Conceptión. Il y a deux ans, il a été récupéré et convoyé par la route jusqu’au musée national de l’aéronautique de Santiago du Chili où il est désormais préservé.

Le Tanker 16, photographié sur le parking de l’aérodrome de Chico. (Photo : Cyril Defever)

Pour les trois autres Firestar, l’histoire a été bien différente. En 2004, les nouvelles règles de l’US Forest Service édictée après les drames de 2002, exclurent d’office les bombardiers d’eau bimoteurs, signant donc l’arrêt des vols des Firestar. Aero Union continua donc son activité avec ses seuls P-3 Orion. Les Neptune furent donc poussés sur le bord du parking avion au nord de l’aérodrome de Chico.

Relique d’un Firestar, retrouvée en 2014 à Chico. (Photo : C. Defever)

En 2010, Aero Union, qui venait de changer de propriétaire, déménagea à Sacramento. Ne pouvant plus rien faire de ces trois avions qui n’avaient plus bougé depuis 6 ans, la compagnie les sacrifia et une pelleteuse les broya sur place. Le Tanker 16, héros de la photo fut donc transformé en petites lamelles de métal et recyclé.

Le « Curve fire » a brûlé pendant une dizaine de jours. Il est déclaré contenu le 12 septembre après avoir parcouru environ 8500 hectares. Il a mobilisé 21 camions et leurs équipages, 10 berces mobiles, 12 hélicoptères dont un SkyCrane, un AirCrane et même un Cobra utilisé à titre expérimental comme Air Attack (appareil de coordination) par l’US Forest Service et 4 Tanker. 900 personnes ont été engagés dans ce combat. Le coût estimé des opérations et des dégâts a été établi à 9,8 millions de Dollars.

Le secteur est à nouveau touché le 22 septembre par le Williams Fire qui finit par rejoindre le secteur brûlé par le Curve Fire. En l’espace d’une vingtaine de jours, 24 000 hectares ont été réduits en cendres. Le secteur autour du Crystal Lake a été interdit au public pendant des mois. La Highway 39, durement touchée, a été fermée partiellement pendant 8 ans, jusqu’en mars 2011.

Brent Conner est aujourd’hui chef-pilote chez Erickson Aero Tanker et vole sur les MD-87 modifiés pour la lutte contre les feux de forêt par sa compagnie. Il est également un membre actif du Tillamook Air Museum où il vole sur des avions anciens comme le très rare chasseur japonais Ki-43, sur P-51 Mustang et donc sur B-17, un avion qu’il connaît vraiment très bien.

Le copilote du Tanker 16, Jason Carter, après avoir volé chez Aero Union, a piloté le Tracker 95 à Redding pour le Cal Fire avant de rejoindre Aero Flite. Il vole désormais sur RJ-85AT.

Mike Lynn a continué de guider les tankers lourds sur les immenses feux de l’ouest des USA avec son King Air jusqu’en 2012. Il est désormais directeur des opérations chez Aero Flite.

Leo Jarzomb poursuit sa carrière de photographe de presse. Il a désormais intégré la rédaction du Los Angeles News Group qui publie une douzaine de quotidiens dont le Los Angeles Daily News mais aussi le San Gabriel Valley Tribune où il travaillait à l’époque.

 

Merci à Brent Conner et Mike Lynn pour leurs témoignages, à Jérôme Laval pour avoir contacté ses collègues et à Cyril Defever pour les illustrations.

 

Sources et notes :
(1) Courrier électronique du 30 juillet 2017.
(2) Deen Oehl, à l’époque pilote de Tracker au sein du California Department of Fire.
(3) National Aviation Director pour l’U.S. Forest Service.
(4) Courrier électronique du 1er août 2017.

Le Musée de l’Aviation de Chasse de Montélimar

De passage dans la Drôme par la vallée du Rhône, l’escale à Montélimar s’impose d’elle-même. Il s’agit bien sûr de refaire les stocks de nougat dont la ville s’est faite la spécialiste, mais aussi de visiter son musée de l’aviation de chasse situé au bord de l’aérodrome d’Ancône, entre la ville et le fleuve.

Le Musée Européen de l’Aviation de Chasse a été créé il y a 30 ans et n’a cessé de se développer. Aujourd’hui, il comporte plus d’une soixantaine d’aéronefs dont une grande partie a trouvé abris dans plusieurs hangars, le reste de la collection étant exposé à l’air libre.

Mirage F1CT parfaitement mis en valeur. Le soleil a néanmoins fait son œuvre et cet appareil mériterait un bon coup de peinture.

Nous nous sommes présentés à l’accueil du musée un dimanche matin, un horaire où nous savions que le musée était habituellement fermé. La chance a voulu qu’une visite de groupe était organisée ce matin-là.

Le musée de Montélimar, au plus près de la piste d’Ancône. (Google Earth)

Nous avons donc été admis à parcourir les allées de l’exposition, et même si nous n’avions que peu de temps à consacrer à cette escale, nous avons réussi à parcourir l’essentiel du musée en une quarantaine de minute, il en faut évidemment plus pour bien tout apprécier.

Le guide du musée. Ne pas l’acheter, c’est pécher !

L’accueil a la caisse a été extrêmement cordial, le tarif demandé, 7 €, ne nous a pas semblé excessif. Nous avons acquis également un exemplaire du guide du musée qui se présente sous forme d’une plaquette couleur de 58 pages, de très belle qualité et vendue au prix dérisoire de 1 €. Elle présente un à un et en détail les aéronefs présents, aussi bien l’histoire général du type que, plus intéressant encore, l’histoire individuelle des avions préservés à Montélimar. Bien sûr, elle date de 2007 et quelques entrées ou aménagements récents ne sont pas indiqués mais c’est peu important. La boutique n’était pas ouverte mais nous avons apprécié le présentoir sur lequel quelques Dassault Magazine relativement récents étaient en libre service.

Outre les avions, le musée expose un nombre invraisemblables de modèles réduits et de maquettes. Le musée héberge également une salle dédiée aux transmissions militaires. De quoi faire rêver les amateurs et collectionneurs de postes de radio !

Le plan du musée remis aux visiteurs

Dès l’entrée, avant même d’aborder le hangar des Mirage suisses, un Stampe et son pilote accueillent les visiteurs. Ce n’est pas un avion de chasse, mais l’avion a formé tant d’aviateurs qu’il n’est nullement hors sujet. A noter que le musée contient un grand nombre d’avions d’entraînement, plusieurs Fouga Magister, T-33, Embraer Tucano et un TB30 Epsilon. Ce dernier doit être le premier exemplaire du type à être entré au musée.

Voici, en quelques photos, un résumé partiel de notre visite, histoire de mettre en avant quelques points notables de notre trop court passage.

Le Stampe qui accueille les visiteurs dans le hall d’entrée.

Dès l’entrée, ce nez de Crusader a attiré notre regard. Il est aux couleurs de l’avion de Phil Vampatella, pilote de la VF-211 au Vietnam. Il manqua de peu d’être le premier MiG Killer de la Navy le 12 juin 1966, mais il obtint quand même une victoire aérienne le 21 juin suivant. Aujourd’hui, Vampatella coule une retraite paisible en Italie. Il a apporté quelques photos et son témoignage au livre que nous avons consacré, avec Sam Prétat, au F-8 au Vietnam chez Zéphyr Editions en 2014.

Nez d’un F-8 au couleurs de l’avion de Phil Vampatella, Mig Killer au Vietnam.

Dans le hangar des Mirage suisses, le IIIRS est présenté avec le compartiment photo ouvert ce qui permet de jeter un œil aux caméras et appareils photos utilisés pour ses missions de reconnaissance.

Une bonne idée de muséographie, le nez photo ouvert.

Dans le même esprit, dans un autre hangar, l’Etendard IVM n°30 est exposé en position de catapultage avec l’élingue en place sur un ersatz de charriot. Rien de mieux pour expliquer comment ces avions étaient lancés depuis le pont du Foch ou du Clemenceau.

Parmi ces astuces de muséographie que nous avons trouvé intéressantes, ce cheminement creusé sous le Mirage IV et qui permet de venir inspecter les dessous du vecteur nucléaire et donc l’emplacement de la « Bombe ».

Un passage est aménagé pour observer les dessous du Mirage IV

Ouragan, Mystère, Super Mystère, Mirage de tous types, dont les restes du second G8, mais aussi F-8P Crusader, Alizé, MS Paris, F-84F, Flamant illustrent les ailes françaises. Ils sont accompagnés de nombreux avions étrangers, Fiat G.91, MiG 15, MiG 23, Vampire, Viggen ou A-4 Skyhawk.

Un des A-4 de l’aviation singapourienne qui ont terminé leur carrière en France, à Cazaux.

Certains de ces avions sont exposés à l’extérieur. Si le soleil a fait passer les peintures, ils semblent plutôt en bon état général.

Un T-Bird dont l’insigne de l’École d’Aviation de Chasse a passé sous le soleil.

Le Mystère XX du CEV de Cazaux, utilisé comme laboratoire volant, ce qui explique son nez radar de chasseur. Derrière lui, la Caravelle, également ex-CEV.

Pièce maîtresse de l’exposition, la Caravelle du CEV est visitable. On y a trouvé un drôle de gardien confortablement installé sur des sièges qui semblent bien trop larges et trop confortables pour être ceux d’une éventuelle classe économique.

Le gardien de la Caravelle en plein travail.

Un peu plus loin, dans l’atelier de restauration, visible à travers une grande baie vitrée, le Mirage IIIEX a débuté son processus de restauration. Cet avion expérimental unique a servi pour définir le standard de certaines versions exports en utilisant un réacteur et un radar de Mirage F1.

Le Mirage IIIEX dispose d’un réacteur et d’un radar de Mirage F1. Il est en cours de restauration. Derrière lui, un MS733 qui attend son heure.

Toujours à l’extérieur, ce DC-3, à l’histoire tourmentée, est aussi en cours de restauration. Son retour en état de vol avait été évoqué un temps mais en attendant il commence à se recouvrir d’une livrée bien militaire, évocatrice du débarquement de Normandie. C’est assez peu original mais ça aura l’avantage d’éveiller l’intérêt des profanes.

En cours de restauration, le DC-3 n’a été que partiellement repeint pour le moment.

Mais c’est accolé à un hangar que se trouve une des pièces les plus étonnantes, à défaut d’être la plus évidente.

Le nez de l’ex-Tanker 15 de T&G, récupéré en Espagne en 2010.

Le nez de ce DC-7C est celui de l’ex Tanker 115/15. Cet avion transformé en Tanker par Aero Union a ensuite volé pour le compte de T&G (la même société qui a loué les C-130A N116TG et N117TG à la Sécurité Civile dans les années 90) jusqu’en 1999, date à laquelle il est vendu, en compagnie du DC-7C Tanker 32 à une société espagnole qui comptait bien les utiliser sur feux (*). Ils ne firent qu’une saison avant que la société ne cesse leur exploitation. Les deux appareils sont alors stockés sur l’aérodrome de Cordoue où il restent immobilisés jusqu’en 2010. Le premier est acheminé alors à l’entrée de la ville où il sert, en quelque sorte, de panneau publicitaire, tandis que l’autre est ferraillé mais sa section avant est préservée et récupérée par le musée de Montélimar.

Le gardien du DC-7, sympathique, mais finalement pas très causant !

En passant par le hangar, on accède au cockpit dont la planche de bord semble complète et en excellent état, ce qui n’avait rien d’évident sur un avion qui a passé une dizaine d’années stocké en plein air.

Le Vautour n°304, récupéré à Savigny-lès-Beaune, en cours de remontage. Une nouvelle belle pièce pour le Musée.

Près de la piste, dans une zone non accessible au public, en face d’un Vautour en cours de remontage, le hangar entrouvert permettait d’entrevoir le Bronco qui est maintenu en état de vol au sein du Musée. Il est régulièrement visible en meetings aériens mais a également une activité importante comme plateforme photo grâce à sa configuration bipoutre et sa capacité à pouvoir voler sans les portes de son compartiment arrière.

Dans son hangar, le Bronco attend que revienne le temps des meetings en se faisant bichonner par les équipes du musée.

40 minutes, c’est donc bien trop court pour pleinement profiter de ce musée riche et sympathique, c’est une évidence ! L’escale à Montélimar est donc un passage presque obligé pour tout passionné passant dans le secteur.

Pour préparer votre visite, notamment en ce qui concerne les horaires d’ouverture, vous pouvez consulter le site du musée, ou bien sa page facebook.

Le Bronco dit « de Montélimar » en démonstration lors du meeting de la Ferté Alais 2016.

(*) Ce choix n’avait rien de stupide et contrairement à ce qu’indique le musée, des DC-7 continuent de voler en dehors des pays du tiers-monde puisque trois avions de ce type restent actif à ce jour comme Tanker dans l’ouest des USA (Tanker 60, 62 et 66).

La Pointe du Diamant

La Pointe du Diamant, ce sont les pilotes de combat du groupe aérien embarqué du Charles-de-Gaulle. (…) Au printemps 2011, les pays arabes s’embrasent, de la Tunisie à la Syrie, mais c’est en Lybie que la situation semble la plus critique et que l’OTAN décide d’intervenir pour empêcher Kadhafi de massacrer son peuple. Le groupe aéronaval embarque donc à nouveau dans l’urgence et s’en va faire la guerre sans savoir combien de temps va durer cette nouvelle mission.

Yannick « Hans » Piart est alors pilote expérimenté, dans l’aviation embarquée depuis une dizaine d’années, et vole au sein de la 12F sur Rafale. La Pointe du Diamant raconte donc cet engagement tel que l’a vécu « Hans » Piart depuis son avion. (..)

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Ce livre a été classé parmi les « coups de coeurs » du site !

Viking relance le CL-415 !

En 2016, la société Canadienne Viking Air Ltd a racheté à Bombardier les Certificats de Type (CT) des amphibies spécialisés dont le groupe avait hérité lorsqu’il avait absorbé Canadair en 1986. Quelques semaines avant le Salon du Bourget 2017, Viking Air a annoncé que son objectif était bien de relancer la production de cet avion de lutte contre les feux de forêt, unique en son genre.

En service depuis 22 ans, les CL-415 français vont bientôt être à la recherche d’un successeur, l’annonce de Viking pourrait offrir une solution simple à ce problème.

Il existe en effet, un marché potentiel pour une nouvelle version, notamment en Europe puisqu’un groupe de travail, regroupant des utilisateurs du CL-415, dont la France, a planché sur un successeur commun aux flottes utilisant l’avion autrefois construit par bombardier et pour lequel il n’existe pas vraiment de successeur idéal. (Voir notre article « remplacer les Canadair ? OK ! Mais par quoi ? « )

Depuis le mois de Mars, la division Amphibious est entièrement active au sein de l’entreprise installée à Calgary pour assurer le suivi technique et réglementaire des flottes existantes.

Au Salon du Bourget, Robert « Rob » Mauracher, Executive Vice President de Viking nous a confirmé que son entreprise travaille activement à la définition d’une nouvelle version, le Viking 415 EAF, pour « Enhanced Aerial Firefigher ».

Comme Viking l’a fait pour le Twin Otter, c’est au niveau de la planche de bord et de l’avionique des avions que la modernisation va porter. L’ensemble de l’instrumentation de vol, où figure encore des indicateurs à aiguilles classiques, sera remplacée par des écrans multifonctions de grande taille mais dont le modèle n’a pas encore été précisé.

Viking annonce que cette option sera disponible en rétrofit aussi bien pour les Bombardier 415 que pour les CL-215T actuellement en service. La date de disponibilité de ces conversions sera annoncée au cours de l’année 2018.

Les cockpits des CL-415 ont bénéficié d’une amélioration notable si on les compare avec ceux des CL-215. Viking propose d’aller encore plus loin en adoptant une suite avionique constituée d’écran multifonction de grande taille.

Pour les appareils portés au standard CL-415 EAF, il a été envisagé un temps de faire évoluer également le système de soutes pour adopter la version à 6200 litres tout en conservant le système de largage à deux portes. Mais cette option ne sera pas développée dans l’immédiat.

D’autre part, Viking s’est déjà porté acquéreur de 11 CL-215 parmi les derniers produits, (série V) dont trois exemplaires ont été, d’ors et déjà, réservés par un opérateur désireux de les faire évoluer vers le standard CL-415EAF. De l’aveu même de ses dirigeants, débuter cette nouvelle aventure industrielle en effectuant ces opérations de rétrofit et d’évolution technologique sur ces appareils a l’avantage de permettre à ses personnels d’en connaître rapidement le moindre recoin et de se « faire la main », avec, bien sûr, dans l’idée de relancer ensuite la production d’avions totalement neufs.

Les CL-215T dotés de la nouvelle suite avionique vont devenir des CL-415 EAF.

Cette éventuelle relance de production est bien évidemment cruciale et dans cette optique Viking a non seulement acheté les certificats de type de cette famille d’appareils, mais l’outil de production a été également compris dans la transaction ce qui permet déjà à Viking de produire à la demande des pièces détachées pour ses clients.

Au cours de cet été, en particulier en France, où la saison a été une des plus actives de ces 15 dernières années, cette éventuelle relance de production a été au cœur des débats, notamment dans la sphère politique.

A ce titre, la venue de l’entreprise Canadienne au Salon du Bourget, mais plus encore, à l’Aerial FireFighting Europe à Nîmes s’inscrit dans une démarche avouée d’aller au contact des prospects et ainsi d’amorcer ou de poursuivre les discussions commerciales préalables à d’éventuelles commandes.

Cette prospection commerciale ne fait que commencer. Viking Air espère cependant pouvoir relancer la production d’appareils neufs d’ici 5 ans, au mieux, avec l’objectif d’atteindre ensuite un rythme de 4 à 5 appareils par an.

Ces appareils neufs, qui seront donc des dérivés des CL-415 actuels mais dotés de la nouvelle suite avionique pourraient porter la désignation commerciale CL-515 et ces avions devraient être éligibles à de toutes nouvelles options avec l’objectif d’améliorer encore d’autres systèmes. C’est aussi l’objet des consultations des clients actuellement en cours. Néanmoins, faire évoluer l’appareil dans ses performances pures, (vitesse, capacité d’emport) ne semble guère envisageable autrement que légèrement.

Pour remplacer ses CL-415, la Sécurité Civile pourrait opter pour l’achat d’avions neufs disposant d’une avionique au goût du jour. Ceux-ci devraient porter la désignation CL-515. Une bonne idée… si les budgets suivent bien évidemment !

Sans être révolutionnaires, ces évolutions permettraient à la grande famille « Canadair » de connaître, à l’instar du Twin Otter, relancé avec succès par Viking Air, une nouvelle jeunesse, et de convaincre aussi de nouveaux clients.

En ce qui concerne l’autre modèle phare de l’entreprise, le DHC-6-400, la version amphibie dispose de l’option bombardier d’eau avec les flotteurs Wipaire spécifiques et une version « tanker » terrestre avec soute interne n’attends plus que trouver sa clientèle.

Après quelques mois d’incertitude, les objectifs de Viking sont maintenant clairs, et c’est plutôt une bonne nouvelle !

 

Frédéric Marsaly & Franck Mée

 

Merci à Robert Mauracher pour son excellent accueil sur le stand Viking au Salon du Bourget et à Christian Bergeron pour en avoir fait de même lors de l’AFF de Nîmes.

 

Article publié initialement le 13 juillet 2017. Dernière mise à jour le 16 novembre 2017.

Les Ailes des Forces Spéciales

Unité spéciale au service des Forces Spéciale, l’escadron Poitou a la particularité d’exploiter aujourd’hui trois types d’aéronefs, le Transall, le C-130H et le Twin Otter. Unité discrète mais « à l’aise partout » elle est engagée régulièrement sur les théâtres d’opération pour « ouvrir » le terrain. Quelque fois les opérations sont clairement clandestines et peu de choses filtrent de ses missions.

Daphné Desrosiers n’est pas du sérail « FS », mais c’est une aviatrice reconnue. Elle a fait un long travail pour rechercher des anciens et est allée à la rencontre des membres du « Poitou » d’aujourd’hui. Elle est parvenue à leur faire raconter leurs aventures, et elles sont nombreuses… et surtout savoureuses le plus souvent. (…)

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