La fin de l’aventure Supertanker

Hier, le Boeing 747-400 N744ST a été convoyé depuis Moses Lake (WA) vers San Antonio (TX). Il s’agit de son ultime vol gréé comme avion de lutte anti-incendie après l’annonce de la cessation des opérations et de la liquidation de son exploitant Global Supertanker Services.

La carrière du N744ST comme « pompier du ciel » s’achève.

Le dernier vol du Supertanker de GSS le 28 mai 2021. (capture : FR24)

Le Boeing 747, dont le système de largage venait pourtant de subir quelques améliorations et avait effectué un vol d’essais à la fin du mois de mars autour de Moses Lake, a été vendu et devrait retrouver la configuration cargo qui était la sienne avant de devenir pompier du ciel au début 2016.

Essais en vol et sans doute dernier largage de l’histoire du N744ST le 24 mars 2021. (Capture : FR24)

Le chantier à venir sera donc d’ôter la soute interne et de supprimer les évolutions que GSS avait fait subir à son avion. Le futur exploitant de l’appareil n’a pas encore été dévoilé.

Voici qui clôt sans doute une histoire qui a débuté il y a une vingtaine d’années lorsque chez Evergreen ont été lancées les bases d’un système de largage pouvant être installé à bord d’un Jumbo Jet.

Le deuxième Supertanker d’Evergreen à Chateauroux en 2009.

Tout au long de son histoire, le projet Supertanker a été confronté à des vents contraires. Les expérimentations d’Evergreen avec le 747-200 puis le 747-100 n’ont pas permis à la compagnie de développer son marché et le « shutdown » de 2013 a été fatal.

La reprise en main du concept et le rachat des soutes pour les adapter à un vecteur plus moderne était porteur de grands espoirs et de la première intervention en Israël à l’hiver 2016 à la terrible saison des feux californienne 2020 et ses tristes records, le 747 a apporté une aide qui s’est avéré décisive à de nombreuses reprises.

Mars 2015, lors de l’AFF de Zadar, les congressistes découvrent le projet de relance du Supertanker par GSS.

Est-ce que l’histoire rebondira une fois de plus ? Rien n’est certain. Mais il existe deux soutes de largage pour 747 qui ne demandent qu’à être rachetées et remises en service.

Le complexe système de largage pressurisé conçu par Evergreen à bord du 747-400 de GSS.

Mais la clé est ailleurs, entre les mains de l’US Forest Service et des collectivités américaines qui, seules, peuvent permettre aux entreprises de travail aérien de pérenniser leurs activités car c’est ce n’est pas vraiment sur le plan opérationnel que le concept a péché comme le démontrent parfaitement les DC-10 de la concurrence.

Les DC-10 restent les seuls VLAT en service. (Photo : RAAF)

En raisonnant de façon simpliste, on pourrait penser que les coûts opérationnels du 747 désormais économisés (on parle d’un budget estimé de 50 000 $ par jour + 16 000 $ par heure de vol, il n’y a pas eu de communication officielle du Cal Fire sur ce point) pourraient permettre à la Californie de louer d’autres avions ou permettre d’accélérer le programme des C-130 hérités des Coast-Guard, sauf que ça ne sera pas le cas, au moins pour la saison 2021.

Les C-130 californiens ne sont pas encore dotés de leurs soutes de largage, le programme traîne en longueur pour de sombres motifs administratifs visiblement. (Photo : Cal Fire)

La fin du 747 marque réellement une perte sèche dans les moyens aériens US.  Et se passer d’un outil de cette importance alors que la saison 2020 a vu se dérouler 3 des 5 plus gros feux de l’histoire de l’État est simplement alarmant.

Et en plus il était splendide !

Visite du 747 Supertanker

Véritable vedette de l’exposition statique de l’Aerial Firefighting Event en mars dernier, le Boeing 747 Supertanker de la société Global Supertanker Services était accessible aux visiteurs. A l’heure où il a rejoint les opérations en Californie voici à quoi ressemble, de l’intérieur, le plus gros « camion de pompiers » volant de l’histoire.

Le Supertanker à son arrivée à Sacramento-McClellan le 11 mars 2018.

Ancien « Liner » de Japan Airlines, le futur N744ST a été mis ensuite au standard cargo (BCF pour Boeing Converted Freighter) pour la compagnie Evergreen International Airlines. A la faillite de celle-ci en 2013, il est racheté par son propriétaire actuel, une société formée essentiellement par des anciens d’Evergreen désireux de poursuivre l’exploitation du concept de Boeing 747 de lutte anti-incendie qu’ils avaient développé depuis le début des années 2000.

Le Supertanker sur le parking de Sacramento, bien entouré.

Alors que les deux précédents Supertanker, qui attendent désormais leur sort dans le désert, n’avaient connu que quelques opérations épisodiques étalées sur une décennie, le nouveau 747, qui a effectué son premier largage test au printemps 2016, a vécu une première année d’opérations plus trépidante qu’espéré, intervenant en Israël en novembre, au Chili de janvier à février 2017 puis en Californie, pour le compte du Cal Fire, du début de l’été à la fin des opérations en décembre. Au total, l’avion a effectué aux alentours de 150 largages opérationnels sur feux pour sa première année de service.

Après un court hiver passé en maintenance à Colorado Springs, sa base principale, l’appareil a été déployé à Sacramento McClellan dès le mois de juin 2018. Il a été activé ensuite à plusieurs reprises par la Californie pour combattre les feux au sud comme au nord de l’état, et le 21 juillet, il a effectué son premier largage en Oregon, à son tour frappé par plusieurs gros feux, une mission ponctuelle effectuée pour le compte du Department of Forestry (ODF) et qui a donné lieu à trois sorties.

La décoration résolument contemporaine du Supertanker est directement inspirée de la livrée « maison » utilisée par Boeing pour ses démonstrateurs.

Orné d’une décoration élégante et contemporaine, le Tanker 944 ne passe pas inaperçu. On accède à son bord par la porte avant gauche qui débouche directement sur le pont principal où se trouvent les deux rangées de réservoirs qui constituent l’ensemble de largage.

Le système est celui qui a été construit et installé pour le premier Supertanker, un 747-200F qui disposait d’une porte cargo dans le nez. Le 747-400BCF ne dispose que d’une porte cargo située à l’arrière, le système capable d’emporter environ 75 000 litres de retardant a donc été modifié pour pouvoir être installé à bord.

Les réservoirs du Supertanker. Les deux circuits sont indépendants et pourraient même être chargés de produits différents, une possibilité qui n’a pas été exploitée jusqu’à présent. A droite, l’échelle sommaire pour accéder au pont supérieur.

Le système de réservoirs et de mise sous pression occupe presque tout le pont principal ce qui fait que le Supertanker conserve les trois compartiments cargo se trouvant sous le plancher du pont principal, bien pratiques pour transporter le matériel nécessaire pour un déploiement. Le compartiment avant peut toujours recevoir deux conteneurs ULD (Unified Loading Device, en français conteneur LD3) et le dévidoir utilisé pour le chargement du retardant. Le compartiment cargo arrière est occupé par les quatre buses de largage et ne peut plus servir qu’à ranger la barre de remorquage de l’avion. Le troisième compartiment, tout à l’arrière, est réservé au vrac et peut aussi continuer à être utilisé pour transporter des pièces de rechange supplémentaires.

Une échelle métallique permet d’accéder au pont supérieur. On est loin de l’escalier des versions passagers. La bosse caractéristique des 747 constitue la « zone vie » du Supertanker avec à l’avant, le poste de pilotage.

Le cockpit du Supertanker ne diffère pas, dans son aménagement, de ceux des appareils de même version utilisés pour des missions plus classiques.

Pour celui qui le découvre, le cockpit d’un Boeing 747 est surprenant. Alors que l’avion affiche des dimensions particulièrement généreuses, le poste de pilotage n’est pas si spacieux, avec un plafond finalement assez bas. Mais il reste assez large pour être confortable. Il est situé relativement en haut et bien en avant du train principal ce qui demande une certaine rigueur pendant les roulages.

Sa planche de bord, avec ses cinq écrans multifonctions lui donnent un aspect très familièrement contemporain. C’est oublier que le premier vol d’un 747-400 remonte à 1988 et qu’il s’agissait, à l’époque, d’une avancée considérable pour la gestion des systèmes en vol. A l’origine, l’équipage des premières versions du 747 était composé d’au moins trois hommes, pilote, co-pilote et ingénieur de bord, les version tardives comme le 747-400 ont été conçues directement pour un équipage à deux.

Néanmoins, la spécificité des missions feux a conduit GSS à créer un nouveau rôle à bord, le DSO, Drop System Operator, assis sur le « jump seat » central et qui dispose d’une console latérale pour gérer l’ensemble du système de largage pendant que les deux autres gèrent l’avion et sa trajectoire.

Le siège du DSO, en arrière de l’équipage, et sa console latérale lui permettant de gérer les circuits du système de largage sous pression.

Le principe du système de largage du Supertanker est d’utiliser de l’air sous pression contenu dans 8 des réservoirs du pont principal. Pour des raisons de centrage, ce sont les réservoirs les plus en arrière, ceux contenant le retardant étant au dessus du centre de gravité de l’avion. Un système de tuyaux permet ensuite à cet air de venir chasser la charge qui se déverse alors par quatre buses situées juste en arrière de l’aile. Pour mettre ces réservoir sous pression, il est nécessaire d’employer un compresseur haute pression externe. L’une des évolutions possibles du Supertanker sera d’ailleurs de pouvoir disposer d’un compresseur interne pour être encore plus autonome lors de ses déploiements. Lors du largage, l’air passe par un système de régulation et en jouant ainsi sur la pression et sur le nombre de buses utilisées, le DSO est en mesure de faire varier la densité du largage (coverage level de 2, faible densité, à 10, forte densité). Le rôle du troisième homme d’équipage est donc crucial.

Derrière eux se trouve la cabine équipée d’une douzaine de sièges de première classe, extrêmement confortables, permettant à l’appareil de se déployer avec son équipe au complet, mécaniciens et équipage de relève. Le système de divertissement en vol qui existait du temps de son exploitation chez JAL a été enlevé lors de sa conversion au rôle de cargo, seule différence notable entre cette « première classe » et celle d’une compagnie régulière.

Le pont supérieur est aménagé avec une douzaine de sièges de première classe, extrêmement confortables.

Car si le pont cargo principal est dépourvu de toutes décorations et fioritures, le pont supérieur est lui, resté au standard d’un avion de ligne, ce qui en fait un espace agréable. Contrairement à beaucoup d’avions de lutte anti-incendies qui sont dépouillés de toutes les traces de leur passé commercial, pour gagner en masse, le 747-400 a tellement de marge sur ce point que GSS a pu se permettre ce luxe, y compris celui de conserver le tissu de revêtement des parois. Juste avant d’entrer dans le cockpit, on y découvre d’ailleurs la remarquable collection de patches obtenus auprès des unités avec lesquelles le Supertanker a travaillé !

Souvenirs du Chili, d’Israël et des opérations en Californie… une belle collection qui ne demande qu’à grandir !

Le fond de la cabine a conservé son « galley » ce qui permet d’assurer un minimum de services lors des vols de convoyage comme ce fut le cas pour relier Colorado Springs, sa base principale, et Tel Aviv ou Santiago lors de ses deux premiers déploiements à très longue distance.

Pour les longs vols, les passagers disposent même d’un galley. notez l’issue ouverte pour permettre la circulation d’air dans l’avion exposé en plein soleil.

Marcos Valdez, volubile pilote, ne tarit pas d’éloges sur son avion qu’il manie avec une dextérité certaine. Son approche et son atterrissage à KMCC, au mois de mars, façon encadrement, en vol à vue et sans toucher au pilote automatique, semblait aussi simple qu’à bord d’un Cessna… mais avec un avion dont la masse dépassait les 200 tonnes !

Scène commune autour d’un aérodrome californien. Un avion en finale tandis que le suivant débute son circuit d’approche.

D’ailleurs, quand on l’interroge sur les problèmes que pourrait avoir cet avion à intervenir dans le relief, il répond, non sans provocation que, quelque soit l’appareil, à une vitesse donnée et un angle identique, le rayon de virage sera toujours le même. Ayant lui-même piloté l’avion lors des interventions dans la Cordillères des Andes et dans les montagnes californiennes, il ne semble pas préoccupé par le côté soit-disant « suicidaire » de son métier. Il en est de même pour ses collègues puisque plusieurs équipages se relaient sur l’avion en cours de saison.

Marcos Valdez, pilote du Tanker 944, en train d’expliquer son outil de travail préféré. Notez les réservoirs qui occupent tout l’espace derrière-lui.

Le 747-400 en configuration Tanker n’est jamais exploité à sa masse maximale. En cas de problème, le largage de la charge en urgence est toujours possible et ne prend que quelques secondes. Ainsi allégé, l’avion, qui dispose d’une réserve de puissance phénoménale même sur trois réacteurs, pourra toujours reprendre de l’altitude ce que beaucoup d’avions pourtant considérés comme plus adaptés à la mission auront plus de mal à faire en performances dégradées même si son utilisation dans le relief nécessite, bien sûr, un indispensable travail d’anticipation des trajectoires.

Néanmoins, vers 170 kt, le 747 largue à une vitesse supérieure à celle d’un CL-415 en croisière. Mais à partir du moment où le Lead Plane prend en compte les spécificités du « Tanker » qui le suit, l’intervention peut se faire en toute sécurité.

La vue dominante offerte depuis le pont supérieur du 747 est étonnante. Notez à droite le second 737-300 Fireliner de Coulson.

Surtout, les techniques de largage du retardant, qui n’exigent pas que l’avion soit collé au terrain pour être efficace, assurent au Supertanker une vraie marge de manœuvre.

Ainsi, si le 747 ne peut pas effectuer un largage direct sur les flammes au creux d’une vallée trop étroite, il pourra, en fonction des conditions météo, larguer sur les crêtes pour empêcher le feu d’envahir la vallée d’à côté ou bien de le stopper à la sortie de la vallée avec le retardant établi en barrière.

Le Supertanker à l’ouvrage en 2017 en Californie.

Les quatre buses de largages du Supertanker 944

Si le scepticisme était de mise lorsque les DC-10 et 747 sont arrivés sur le marché de la lutte anti-incendie, il y a un peu plus de dix ans, aujourd’hui, ils ont, par leurs actions contre les feux, fait taire une grande partie des critiques à leur égard. La réponse aux inquiétudes ayant pris la forme de longue bandes rouges sur les collines noircies de Californie et d’ailleurs. Désormais on peut dire que les hommes du Cal Fire et des autres corps de pompiers qui combattent les feux au sol comptent vraiment sur eux.

Pour les spécialistes, le système utilisé à bord du Supertanker, d’une mise en œuvre complexe, est loin d’être aussi efficace sur feux que peuvent l’être les systèmes à gravité « constant flow » par exemple. Pour les interventions que le Supertanker a été amené à conduire lors de ses différentes missions aux USA, la pose de barrières de retardant, le système a été considéré comme tout à fait acceptable. Néanmoins, lors de ses interventions au Chili, où il est devenu iconique, et où il a travaillé avec du retardant court-terme et en largage direct, son action a été reconnue comme sensiblement moins efficace que les autres avions engagés sur les mêmes feux, le BAe 146 de Neptune Aviation et l‘IL-76 VAP-2 d’Emercom.

Au cours des conférences, plusieurs responsables des pompiers californiens ont toutefois souligné l’action décisive des VLAT en contrat avec le Cal Fire, sur les immenses feux qui ont touché l’état l’année dernière avec un hommage particulièrement appuyé au Boeing 747 dont c’était pourtant la toute première saison.

Face à face entre le Tanker 944 et le Tanker 85 du Cal Fire. Des appareils aux performances opposées mais, finalement, terriblement complémentaires.

On se souvient que ce sont les contrats accordés par l’État de Californie au DC-10 qui ont ainsi permis au triréacteur de faire ses preuves sur le terrain et de convaincre ensuite l’USFS de lui accorder des contrats d’emploi exclusifs, permettant alors à la flotte de la société 10 Tanker de se développer. L’histoire ne serait-elle pas en train de se répéter, cette fois-ci au profit de GSS ?

 

merci à Marcos et Bob pour l’accueil !

GSS new Boeing 747-400 Supertanker

In December 2013, Evergreen International ceased activity. Awkward timing: their Supertanker, which was stored in Marana, Arizona, had just been promised a “call when needed” contract with the US Forest Service. And these last few years, Very Large Air Tankers (VLAT) which had been awarded call-when-needed contracts have proven very useful, and sometimes even more profitable exclusive contracts came after hard-working seasons.

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New Supertanker early artist’s view. Tanker 947 became finaly 944. (GSS)

To be a candidate to these contracts, Boeing 747-100 Tanker 979 had to get back in the air, which needed to find turbojets and perform a C check maintenance operation, a full inspection of the airframe, engines and systems. The whole operation would cost an estimated $1 million; Evergreen postponed the check for a few months… and went bankrupt in the meantime. The aircraft remained in Marana while her owner’s assets were auctioned.

According to the terms of the potential USFS contract, the plane was to yield $75’000 each day it was activated, plus $12’000 per flight hour, and fuel and retardant were to be supplied by the federal organization. Even though USFS promises can be fluctuating, these terms were very attractive. Therefore, former Evergreen employees, most of them deeply involved in the Supertanker project, created a new, dedicated company: Global SuperTanker Services, LLC. When Evergreen was liquidated, they bought the pressurized drop system, spare parts and patents. They also acquired a younger, more efficient aircraft: the new Supertanker, third of its kind, is based on a Boeing 747-400.

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Future 3rd generation Supertanker, Boeing 747-446 JA8086 is seen landing in Hong Kong on 12th august 2010. Photo : Peter Bakema)

N744ST (cn 25308, the 885th 747 to be produced) was built in 1991 as a Boeing 747-446, and first flew on 25 October 1991. Delivered to Japan Airlines the following month and registered JA8086, she would be flying passenger service until 2010. She was then bought as N238AS by AerSale Inc., a company dedicated to second-hand aircraft market, which turned her into a 747-446(BCF) freighter and sold her to Evergreen (as N492EV) in 2012. In November 2013, when Evergreen ceased operations, she was put on storage in Victorville, California.

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Having Become a Boeing 747-446(BCF) after its cargo conversion and registred N492EV the future Supertanker is stored at Victorville (California) in november 2013. (Photo : Sawas Garozis)

Global SuperTanker Services chose a 747-400 because of its improved efficiency. 25 years have passed since its inception: the time has now come when big airlines start selling aircraft of this type, and airframes which still have some potential become affordable. N744ST has flown 75’000 hours; a properly maintained 747 can log 100’000 flight hours, which lets her some 25’000 hours to live. As a tanker seldom flies more than 500 hours a year, she could remain active for decades.

With new, more powerful engines than the previous Supertankers, this new aircraft can take-off at a maximum weight close to 400 tons, but she probably won’t meet this weight very often in her new career. Therefore, she will have a more favorable thrust-to-weight ratio, which is obviously interesting for this mission. Her more modern conception also implies rationalized maintenance processes, which will reduce immobilization times and cost for these essential operations. The 747-400 also has a “glass cockpit”, with standard navigation, systems management and operating systems conceived for a two-man crew, while previous Supertankers needed a flight engineer to face the workload of planes conceived in the late 70s.

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With its modern flightdeck, here JA8071’s, with wide color screens to give crew all data they need, 747-400 only need a two men crew. (Photo : Norio Nakayama)

After being bought by GSS, N744ST quickly went through a C-check operation in Victorville. On 23 January 2016, she flew to Marana, Arizona, to get her modern, gleaming and spectacular new painting. She was christened Spirit of John Muir, after the famous Scottish-American writer/adventurer — who was also a naturalist and a pioneer in the environmental movement.

Her now permanent base is in Colorado Springs, but her first public display was on 22 March 2016 in Sacramento: she was the great attraction during the Aerial Fire Fighting conference, held on McClellan airfield.

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GSS Supertanker at Aerial Fire Fighting 2016 at McClellan Airport in Sacramento. (Photo Jim Dunn)

During her painting stay in Marana, the release system taken from the first-ever Supertanker was also installed. This needs a bit of an explanation. During the adventures of Evergreen’s Supertankers, two successive tanks systems were conceived. The first one was made of steel and installed on pallets, so it could easily get in and out through the nose door of a Boeing 747-200F, keeping the multi-purpose abilities of the type. This was not possible for the former passenger 747-100s, so Evergreen conceived a new, lighter, aluminum-built mechanism, which was permanently installed through the side cargo door. When the second Supertanker was stored, the whole system was taken off the plane… and when Evergreen was liquidated, it was nowhere to be found!

Consequently, when GSS bought Evergreen’s fire fighting assets, it included only the first dropping system, which had been cleanly stored in Marana. So it is this one, cleared of its now useless pallets but retaining its 75’000 liters capacity, which was installed in the new 747-400.

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Drawing from an Evergreen Patent showing the tank systems of the first Supertanker (B747-200) salvaged and fitted to the GSS B747-400 Tanker 944.

As the drop system was already approved by the FAA and the Interagency Airtanker Board in the Forest Service, the adaptation should by quick and N744ST could be a candidate to operations as soon as this summer. The first ground drops were made on 30 April 2016 and the next day, she made her first test flight and first aerial drop.

GSS Supertanker 1st test

First ground test of the Tanker 944 drop system in 30th april 2016. (Photo : GSS)

Her crew consisted of Cliff Hale, GSS chief pilot and more importantly former Evergreen Supertanker captain — the man who flew more than 90% of trial and demonstration flights, as well as every operational drop. His first officer was Tom Parsons, an experienced tanker pilot who has flown with Neptune Aviation. A third seasoned pilot has also been hired: in the process of extending his type rating, he was put in charge of rough terrain testing.

Tanker 944 first drop (GSS LLC)

First test drop on 1st May 2016. (Photo : GSS)

For most passenger or freight missions, Boeing 747-400s require only a two-man crew, but fire fighting is another deal. GSS invented a third crew member, named Drop System Operator. Bob Soelberg, GSS Vice President and Supertanker program manager, explains: “Global SuperTanker has felt from the beginning that both pilots need to be focused on flying and communications, not drop system set up. For that reason, we have modified the flight deck to allow Don Paulsen, our Chief Safety Officer and former flight engineer, to act as our DSO.”

Settled in the center jump-seat, Don Paulsen will be responsible for selecting the proper settings for the retardant release system, according to the situation and the requirements from the authorities, and then tell the pilots when the device is ready to drop. In Evergreen’s Supertankers, the flight engineer was in charge of the release system, with some information also displayed on the cockpit’s center console; on the new installation, everything was designed to be in the DSO’s reach. This new job could be offered to former flight engineers as well as seasoned air mechanics, with a proper DSO training course still to be approved by the FAA; meanwhile, a second DSO has already been hired and should also be trained as a first officer.

This new aircraft also has important room for improvements. For example, Supertanker operations not only need an airfield with a long and resistant enough runway; they also need an air compressor, necessary to the pressurized release system. GSS thinks about installing two compressors aboard, so the plane would be able to arm her equipment on her own. New wiring was pre-installed for potential new equipments, notably for new data management requirements — thus, the Supertanker could offer a load of technical data about it systems as well as its structure. Yet, these modifications are a future matter and the aircraft currently still conforms to Evergreen original STC: according to Bob Soelberg, “some pre-positioning of components will allow us to respond to future requests for various data output. This decision [not to make new installations right now] was based on the lack of clear guidance on which system would be most common among the various agencies, as well as our desire not to delay the FAA STC process.”

When the second Supertanker came in Châteauroux, France, in July 2009, Evergreen was already considering night operations, thanks to the craft’s ability to drop higher than conventional tankers and avoid risks of flying too close to the ground. GSS is also working this way and has already made some preliminary studies in that regard, analyzing experience from L.A. Fire Department helicopter pilots, who have been flying by night for years. To add night VFR capabilities to the Supertanker, many evolutions are considered, such as installing enhanced vision systems or modifying the cockpit so it could be used while wearing night vision goggles. No decision has yet be made, as it is still a long-term evolution project.

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Example of an Enhanced Vision System : the « Clear Vision (TM) from Elbit Systems. (Elbit Systems)

Amongst VLATs, the Supertanker is also unique in being qualified to work on oil spills, Evergreen having entered this market after the Deepwater Horizon disaster: N744ST will be able to release oil dispersant as soon as she’ll be certified. Since the dropping system is made of two individual, parallel, independent 37’500-liter lines of tanks, GSS says she could even work as a fire suppression tool and an oil dispersant vector at the same time. From its base in Colorado Springs, she could reach the Gulf of Mexico within 3 hours and get anywhere in the world in about 20 hours; as says Bob Soelberg: “Our niche is the ability to respond quickly to areas of the world where local capabilities are limited.”

Global-SuperTanker-logo1 500 pixIn the near future, certification should not be a problem and the main question is: will the USFS, which still lacks some fire fighting aircraft, honor the promises made to Evergreen in 2013? That is the hole point, though GSS is also talking to Australia (who has been successfully using one of 10 Tanker’s Douglas DC-10s for the last two years) and to the European Union’s Emergency Response Center.

Evergreen’s history has shown that such a huge plane seldom finds missions big enough for her. Yet, these last few years (and especially the very rough 2015 season) saw very impressive fires and asked for an intensive use of VLATs; particularly, the three DC-10s belonging to 10 Tanker, LLC have proven more than useful. Can the new Boeing 747-400 be a better match for the next years fires? Will the Forest Service follow up on GSS’s arguments? The next few weeks will be decisive for this exciting project.

Translated by Franck Mée

French version here

La renaissance du Boeing 747 Supertanker

Lorsque la compagnie Evergreen International a cessé son activité en décembre 2013, le Supertanker, alors stocké à Marana, à mi chemin entre Tucson et Phoenix dans l’Arizona, avait pourtant reçu la promesse d’un contrat en « Call When Needed » – activable en cas de besoin – de la part de l’US Forest Service. Or, ces dernières années, les VLAT activés en CWN n’ont vraiment pas manqué de travail. A l’issue de ces saisons difficiles des contrats d’emploi exclusifs, plus rentables encore, les attendaient parfois.

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Vue d’artiste du nouveau Supertanker, diffusée au moment du lancement du projet. Prévu pour être le Tanker 947, l’avion porte désormais le numéro 944 (GSS)

Pour que le Boeing 747-100 Tanker 979 puisse reprendre l’air, et se porter candidat à ces différents contrats, il lui fallait subir une opération de maintenance de type C nécessitant une inspection complète de la cellule, de la motorisation et des systèmes de pilotage. Il fallait aussi lui retrouver plusieurs réacteurs. Le coût de ces opérations, estimé à un million de Dollars, avait conduit Evergreen à repousser l’opération de quelques mois. On sait ce qu’il est arrivé alors. L’avion est donc resté à Marana, attendant que les avoirs de son ancien propriétaire soient liquidés aux enchères.

Or, les termes du possible contrat USFS, accordant à cet avion 75 000 $ par jour d’activation et 12 000 $ par heure de vol effectuée – le coût du retardant et du carburant étant pris en charge directement par l’organisme fédéral – et même si les promesses de l’USFS sont souvent très fluctuantes, étaient particulièrement attractifs.

Une nouvelle société, portée par plusieurs anciens de la société Evergreen, souvent très impliqués dans le projet Supertanker, voit le jour ; Global SuperTanker Services. Lors de la liquidation d’Evergreen elle se porte acquéreur du système de largage pressurisé du Boeing 747, des réserves de pièces de rechange et les brevets afférents. Elle jette aussi son dévolu sur un appareil plus récent, plus performant et plus moderne. Ainsi, le nouveau Supertanker, le troisième du nom, est un Boeing 747-400.

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le Boeing 747-446 JA8086, futur Supertanker de 3e génération, se pose à Hong Kong le 12 août 2010. (Photo : Peter Bakema)

Le N744ST (c/n 25308, 885e 747 produit) a été construit en 1991 comme Boeing 747-446 Il fait son premier vol le 25 octobre 1991 avant d’être livré à Japan Airlines le mois suivant où il vole sous l’immatriculation JA8086 jusqu’en 2010 en configuration passagers. Il est revendu sous l’immatriculation N238AS à AerSale Inc, une société spécialisée dans le marché des avions d’occasion, qui place ensuite l’avion chez Evergreen International après sa transformation en Boeing 747-446(BCF) cargo en 2012, immatriculé N492EV. L’avion est stocké à Victorville à partir de novembre 2013 en raison de la cessation d’activité de son exploitant et jusqu’à son rachat par Global Supertanker Services.

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Devenu un Boeing 747-446(BCF) et immatriculé N492EV, l’appareil est stocké à Victorville en Californie à partir de novembre 2013. (Photo : Sawas Garozis)

La compagnie explique le choix du 747-400 par la modernité de cet appareil et ses performances. Plus de 25 ans après son lancement, l’appareil entre aussi dans la période charnière où les grande compagnies commencent à s’en séparer et que des cellules avec un certain potentiel deviennent vraiment abordables sur le marché de l’occasion.

En effet, le N744ST a accumulé 75 000 heures de vol au cours de sa carrière. Bien entretenu, un Boeing 747-400 peut atteindre sans problème les 100 000 heures, il lui reste donc un potentiel d’environ 25 000 heures. Sachant qu’il est très rare qu’un Tanker dépasse les 500 heures de vol annuelles ; en théorie, il pourrait être donc opérationnel plusieurs décennies.

Équipé de moteurs plus modernes et plus puissants que les deux précédentes versions du Supertanker, le nouvel appareil peut décoller à la masse, maximale, de 400 tonnes, un chiffre qui sera rarement atteint au cours de sa nouvelle carrière. Il va disposer d’un rapport masse/puissance assez favorable et dont l’utilité en mission semble évident. Cette relative modernité se traduit également par des processus de maintenance plus rationnels ce qui ne manquera pas d’influer sur les temps d’immobilisation et donc sur le coût de ces opérations vitales.

Le Boeing 747-400 dispose également d’un « glass cockpit », disposant des outils standards de pilotage, de navigation et de gestion des systèmes, conçu pour être exploité par un équipage de deux hommes seulement, là où les précédentes versions du Supertanker exigeaient en plus la présence d’un technicien navigant afin de faire face à l’importante charge de travail requise par les appareils construits jusque dans les années 80.

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Grâce à son cockpit plus moderne – ici celui du JA 8071, sister-ship du Tanker 944 – dont les écrans permettent à l’équipage d’afficher les informations et d’intervenir sur les systèmes au moment opportun, le 747-400 n’a plus besoin que d’un équipage de deux hommes pour voler. (Photo : Norio Nakayama)

Racheté par GSS l’avion est entré rapidement en chantier de maintenance type C directement à Victorville en Californie. Le 23 janvier 2016, l’avion est convoyé jusqu’à Marana, en Arizona, pour entrer en atelier de peinture d’où il ressort fin février recouvert d’une seyante décoration moderne, rutilante et spectaculaire. C’est à Marana que le système de largage est récupéré et installé puis l’appareil repart pour sa base définitive à Colorado Springs.

L’avion est présenté en public pour la première fois le 22 mars 2016 à Sacramento, au cours de la conférence Aerial Fire Fighting organisé sur l’aérodrome de McClellan, dont il a été la grande vedette.

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Le Boeing Supertanker de GSS sur le parking de McClellan à Sacramento en mars 2016 pour la conférence Aerial Fire Fighting. (Photo : Jim Dunn)

Au cours de l’histoire du Supertanker, deux systèmes de largage ont été construits et installés sur les deux précédents appareils. Le premier, en acier, était palettisé  afin de pouvoir être installé ou retiré facilement du Boeing 747-200F porteur grâce à sa porte cargo de nez et lui conserver ainsi une vraie polyvalence. Lorsqu’il s’est agit de basculer le concept vers un 747-100, Evergreen a fait concevoir un deuxième système de pressurisation et de largage en aluminium, plus léger, et sans palette, installé à demeure grâce à la porte cargo latérale. Au moment où le Boeing 747-100 a été placé en stockage, le système a été ôté de l’avion, mais lors de la liquidation d’Evergreen il n’a pas été retrouvé ! (1)

Lorsque GSS s’est porté acquéreur des brevets Evergreen, c’est le système initial, toujours stocké à Marana, qui a été acquis. C’est donc celui-ci qui est désormais installé à bord du 747-400. Il a été modifié par la suppression des palettes mais contient toujours 75 000 litres.

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Schéma de principe du premier système de largage du Supertanker installé sur le Boeing 747-200 à partir de 2005. C’est ce système qui a été récupéré et modifié pour être installé à bord du 747-400.

Comme le système de largage a été déjà validé par la FAA et par l’Interragency Airtanker Board du Forest Service, le processus d’acceptation de l’appareil pourrait être rapide et l’avion se porter candidat aux opérations dès cet été. Dans ce cadre, les premiers largages au sol ont été effectués le 30 avril.

GSS Supertanker 1st test

Le 30 avril 2016, le Tanker 944 procède aux premiers essais de largage au sol. (Photo : GSS)

Le lendemain, l’avion a effectué son premier vol d’essais et son premier largage.

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Premier largage d’essais du Tanker 944, le 1 mai 2016. (Photo : GSS)

Ce nouvel avion dispose également d’un potentiel évolutif non négligeable. Pour son utilisation opérationnelle, le Supertanker ne dépend pas seulement d’une station de remplissage installée sur un aérodrome disposant d’une piste assez longue et assez solide pour le recevoir, mais aussi de la présence d’un compresseur d’air indispensable à la mise en œuvre du système de pressurisation du largage. GSS envisage donc d’installer deux compresseurs internes afin de rendre l’appareil totalement autonome sur ce point.

Lors de la présentation du deuxième Supertanker à Châteauroux en juillet 2009, les équipes d’Evergreen avaient déjà annoncé songer à une utilisation nocturne du Boeing 747 grâce à sa capacité de larguer plus haut que les avions plus conventionnels, lui permettant ainsi de s’affranchir des risques liés à la proximité du terrain. GSS suit également cette voie et des études préliminaires ont déjà été effectuées en ce sens, notamment en se servant de la longue expérience accumulée par les pilotes des voilures tournantes du Los Angeles Fire Department rompus à cette discipline depuis de nombreuses années. Pour une utilisation du Supertanker en VFR de nuit, plusieurs pistes sont envisagées comme l’installation d’un EVS ou l’adaptation du cockpit à l’utilisation de jumelles de de vision nocturne. Aucune décision n’a toutefois été prise pour le moment et cette évolution est une prévision, de toute façon, à long terme .

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Exemple d’Enhanced Vision System, le « Clear Vision (TM) » d’Elbit Systems. (Photo : Elbit Systems)

Car une question essentielle doit d’abord être tranchée : est-ce que l’USFS, qui est toujours en léger déficit d’avions de lutte anti-incendie, tiendra les promesses faites en 2013 ? C’est là le nœud du problème.

Global-SuperTanker-logo1 500 pixL’expérience préalable d’Evergreen a fait la démonstration qu’il était très difficile à un avion aussi imposant de trouver des missions à sa hauteur. Cependant, les récents incendies dans l’ouest de les USA, et la saison 2015 a été particulièrement difficile sur ce point, ont entraîné une utilisation intensive des Very Large Air Tankers, en particulier des trois DC-10 de 10 Tanker, qui à défaut de se montrer décisifs, se sont montrés particulièrement utiles.

Le Boeing 747-400 peut-il s’inscrire dans cette logique ? Le Forest Service sera-t’il sensible aux arguments de GSS ? Les semaines à venir risques d’être cruciales pour le développement de ce passionnant projet.

(1) Il aurait été récupéré depuis.