Walt Darran International Aerial Firefighting Award

Depuis deux ans, les pompiers du ciel ont leur récompense, un trophée destiné à distinguer un individu ou un organisme qui aura contribué significativement à l’amélioration de la sûreté et de la sécurité des équipages des aéronefs de lutte anti-incendie ainsi qu’à l’efficacité de leur mission.

Ce trophée porte le nom d’un pilote du Cal Fire, décédé en 2013 après une carrière bien remplie et qui contribua, par de nombreuses actions, prises de position et fonctions au sein de différents organismes, à améliorer la situation de ses collègues. Après sa disparition, ses amis ont donc décidé de perpétuer son souvenir en rendant hommage à ceux qui, comme lui, s’engagent pour améliorer les conditions d’exercice de cette profession difficile.


Walter « Walt » Darran (1940-2013)


La carrière de pilote de Walt a commencé au sein de l’US Navy. Pilote de Skyraider, il participe à la guerre du Vietnam avant de rejoindre Air America. De retour aux USA, il débute une carrière de pilote de bombardier d’eau en 1971 chez Hemet Valley Flying Services et participe notamment, au début des années 70, aux premiers essais du S-2 Tracker modifié pour cette mission.

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Walt Darran, prêt à mettre en route son S-2 Tracker. (Photo : Firepirates.com)

En 1979, il quitte le métier pour devenir copilote sur les Boeing 737 d’AirCal puis devient commandant de bord chez American Airlines.

A 60 ans, atteint par la limite d’âge pour exercer son métier de pilote de ligne et considéré légalement comme inapte à se servir d’un pilote automatique, il quitte la ligne pour retrouver le cockpit d’un monomoteur AgCat bombardier d’eau avant d’intégrer, l’année suivante, le California Fire Department, aujourd’hui Cal Fire, et de voler sur Tracker, un avion heureusement dépourvu de toute aide automatique au pilotage. Il est le pilote attitré du Tanker 93 de la base de Chico jusqu’à ce qu’il raccroche casque et gants en 2009.

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Pendant des années, le Tracker 93 a été la monture personnelle de Walt Darran sur la base de Chico. (Photo : Firepirates.com)

Lors de cette nouvelle carrière Walt s’est fortement engagé, notamment au sein de l’Associated Aerial Firefighter dont l’objectif est de promouvoir un environnement professionnel plus sûr et plus efficace aux acteurs de la lutte aérienne contre les incendies, en devenant Président de la commission de sécurité et finalement, Président de l’association.

Quelques mois avant sa disparition, Walt avait répondu aux questions de Bill Gabbert, le webmaster du blog « Fire Aviation », tandis que dans son article dans la newsletter du CFPA, en octobre 2013, Chuck Lees avait retracé les grandes lignes de cette fantastique carrière. La liste des avions sur lesquels il a volé au cours de ses quelques 2600 heures de vol sur feux est juste impressionnante.



Le premier Walt Darran Award est décerné en 2014 à George Petterson, ancien enquêteur du National Transportation Safety Bureau, l’organisme en charge des enquêtes techniques sur les accidents impliquant des moyens de transport aux USA.

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M. George Petterson, ancien enquêteur du NTSB et premier récipiendaire du Walt Darran International Aerial Firefighting Award en 2014.

Sur ses fonds propres, après le spectaculaire accident du C-130A Tanker 130 à Walker en Californie, il a relancé l’enquête sur un précédent accident qui avait touché en un autre C-130A des pompiers du ciel américains, le Tanker 82, tombé en 1994 dans les collines au sud de Pearblossom, toujours en Californie, un accident qui était resté globalement inexpliqué. Sentant qu’il pouvait y avoir un point commun entre les deux drames, qui ont coûté la vie à six aviateurs au total, il est retourné prélever des débris sur le site du crash de 1994 et a financé leur analyse.

C’est ainsi qu’il a pu confirmer que les deux avions avaient été victimes d’une même défaillance du longeron principal, dont les fissures étaient restées, faute d’entretien spécifique, indétectées. Cette découverte a entraîné la publication d’un « Service Bulletin » par Lockheed pour que les longerons des C-130A soient mis systématiquement sous surveillance. Il ne fait aucun doute que la très grande implication de M. Petterson dans son travail a sauvé des vies et pas seulement au sein des pompiers du ciel.

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Philippe Bodino (au centre), lors de la remise de son prix.

En 2015, c’est le français Philippe Bodino qui est distingué. Officier du corps des Sapeur-Pompiers, M. Bodino, a dirigé la rédaction du Guide d’Emploi des moyens aériens, puis a commandé l’École Nationale Supérieure des Officiers de Sapeur-Pompiers (ENSOSP) à Aix en Provence.

Auparavant, en tant que chef du service opérations à l’état major de Sécurité civile de la zone sud, il avait participé à l’évaluation opérationnelle des nouveaux avions CL-415 de la Sécurité Civile.

Le troisième Walt Darran Award sera décerné lors de la conférence Aerial Fire Fighting 2016 qui se déroulera à Sacramento au mois de mars prochain.

Zadar, AFF2015 Europe

Organisées par la société britannique Tangent Link, les conférences internationales annuelles Aerial Fire Fighting se déroulent alternativement sur le continent américain ou sur le continent européen. L’an dernier, l’AFF 2014 avait été organisé sur l’aérodrome de McClellan à Sacramento, capitale de la Californie, mais où se trouve aussi la base principale du Cal Fire. En 2015, c’est à Zadar, jolie ville balnéaire croate sur la côte adriatique que la manifestation a pris place.

Zadar Header

Le choix de cette ville ne doit rien au hasard puisque l’aéroport de la ville partage ses installations avec une base aérienne, laquelle héberge l’école de pilotage de la Force Aérienne Croate et ses Pilatus PC-9, une escadrille d’hélicoptères et la 855e escadrille équipée de CL-415 et monoturbine Air Tractor, en charge de la lutte aérienne anti-incendie.

L’objectif de cette manifestation est de regrouper tous les acteurs du secteur, industriels, opérateurs publics et privés, sous-traitants, pilotes, techniciens ou dirigeants, afin que des échanges puissent bénéficier à tous, partenaires comme concurrents, à commencer par la sécurité et l’efficacité des opérations. Pour cela, de nombreuses interventions de professionnels reconnus sont organisées, accompagnés d’un petit salon spécialisé et d’un programme de démonstrations en vol. Comme beaucoup de colloques internationaux, le ticket d’entrée sert également de filtre pour écarter les simples curieux puisqu’il faut compter plus de 1000 $ par personne pour pouvoir accéder à la manifestation.

Les choses sérieuses commencèrent dès le mercredi matin, dans la grande salle de conférence du centre omnisports de la ville avec un programme copieux de conférences offertes par des industriels, des opérateurs ou des scientifiques, impliqués dans le développement des outils et des méthodes de lutte contre les feux de forêts.

Parmi les interventions les plus notables, celle du  Major Turkovic, commandant de l’escadron de lutte anti-incendie croate a permis de saisir les subtilités des opérations transfrontalières entre les pays de l’ex-Yougoslavie. Le Dr Huseinbasic, de Bosnie, a expliqué les difficultés des opérations contre les feux sur les anciens champs de batailles des récentes guerres des Balkans encore contaminées par de nombreuses mines et munitions non explosées. Des représentants de Dyncorp, opérateur des avions du Cal Fire, d’Inaer, opérateur de flottes spécialisées en Espagne et en Italie, du constructeur Air Tractor et de Coulson Flying Tankers, sont venus présenter leurs entreprises, leurs produits, leurs méthodes et leurs perspectives de développement. Plusieurs pilotes et représentants gouvernementaux, dont ceux de la France, du Liban, d’Espagne, de Russie, d’Australie, du Chili et de Roumanie ont également évoqué certaines de leurs spécificités nationales.

Plusieurs industriels étaient également présent pour tracer des perspectives ouvertes par certains développements technologiques pouvant intéresser les opérateurs de ce domaine. En Suède, SAAB  étudie la possibilité de développer des HUD adaptés aux opérations de lutte anti-incendie, pour avions comme hélicoptères. Les japonais, de leur côté, ont travaillé sur des simulations de systèmes de guidage et d’alerte de trajectoires pour les bombardiers d’eau, avec sans doute en tête une hypothétique version spécialisée du US-2i ShinMeiwa à bord duquel l’équipage pourrait disposer de viseurs de casque à l’instar des pilotes des chasseurs et hélicoptères de combat les plus avancés.

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Victor Devouge, ‎Chef du Bureau des Moyens Aériens de la Sécurité Civile française au cours de son allocution relative à la doctrine d’utilisation des appareils dans notre pays et à ses perspectives d’avenir.

Entre chaque session de conférences, il était possible de prendre une pause en déambulant parmi la vingtaine de stands tenus par des industriels du secteur, venus du monde entier comme Conair, Coulson Flying Tanker, Dyncorp, Air Tractor, International Air Response, 10 Tanker Air Carrier, Sierra Nevada Corporation, Global Supertanker Services, Inaer et bien d’autres encore.

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Le stand de la société Global SuperTanker Services qui chercher à relancer le Boeing 747 comme appareil de lutte contre les feux de forêts en partant du projet développé par Evergreen.

Le soir venu, un dîner de gala a été offert par l’organisateur dans une très belle salle de réception près du port, l’Arsenal. Au cours des festivités, le français Philippe Bodino a été honoré par l’attribution du Walt Darran International Aerial Firefighting Award.

Le lendemain matin, les participants à l’évènement ont été conduits sur la base aérienne pour assister à un court, mais dense, programme de présentations en vol.

La démonstration d’un CL-215T espagnol a été suivie par celles de trois avions croates, un AT-802F, un « Fire Boss » et un CL-415. Ensuite un Mil Mi 171 a effectué une dépose- récupération d’une équipe de pompier grâce à la méthode, éprouvée, de la grappe,  avant qu’un CL-415 des Vigili del Fuoco ne vienne terminer le programme. Cet avion avait la particularité d’être équipé de rampes d’épandage sous les ailes, utilisables avec les dispersants efficaces contre les marrées noires par exemple. Cette installation permet toutefois au CL-415 de conserver intactes ses capacités de lutte anti-incendies.

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Le CL-215T venu d’Espagne en plein largage.

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Un des six CL-415 de l’aviation militaire croate.

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Les Mil Mi 171 de l’aviation Croate peuvent être utilisés pour acheminer des pompiers dans les zones les moins accessibles.

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Ils peuvent être récupérés ensuite selon différentes méthodes comme la grappe.

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En plus de ses CL-415, l’aviation croate possède six monoturbine Air Tractor dont plusieurs Fire Boss, à flotteurs et capables d’écoper.

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Les Air Tractor AT-802F de l’aviation croate peuvent emporter jusqu’à 3 tonnes d’eau ou de retardant.

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Les pompiers italiens disposent d’un kit d’épandage sur CL-415 permettant à l’avion de lutter contre les marrées noires avec des dispersants chimiques.

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L’appareil équipé du système d’épandage conserve toutes ses capacités anti-incendies.

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Détail de la pompe et des rampes d’épandages sur le CL-415 des Vigili del Fueco.

Au statique se trouvaient deux autres Air Tractor biplaces, dont un Fireboss à flotteurs, un PC-9 de l’école de l’Air croate, un Bell 206 basé localement et un CL-415 de la Sécurité Civile qui, victime d’un souci technique en arrivant, est resté au sol en attendant une intervention des équipes techniques françaises.

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Un des AT-802F biplaces de l’aviation Croate. Il est utilisé pour la transformation des équipages mais conserve toutes ses capacités opérationnelles.

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Les Fireboss existent aussi en version biplace pour la formation et la transformation des équipages.

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Le CL-415 « Pélican 35 » sur le parking avions de la base de Zadar.

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Pilatus PC-9 de l’école d’aviation militaire croate.

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Bell 206 de l’aviation militaire croate. Dommage que cette livrée originale et voyante n’ait pas été appliquée aussi sur les avions de lutte anti-incendie.

Les dernières conférences se sont déroulée dans l’après-midi avant que les participants ne se séparent.

La richesse informative de ces communications tout comme la qualité des différents intervenants positionnent clairement les évènements AFF de Tangent Link comme des moments importants, peut-être incontournables, juste avant le début des saisons feux dans l’hémisphère nord. Il faut donc absolument saluer l’existence d’un tel forum international où les échanges, qu’ils soient d’ordres techniques, opérationnels ou même commerciaux ne peuvent qu’enrichir les cultures professionnelles des participants, des opérateurs et des nations qu’ils représentent.

D’ors et déjà, le AFF2016 Event est prévu pour le mois de mars prochain et se déroulera une fois de plus à Sacramento.

Cessna célèbre les 30 ans du C208 Caravan… qui a fait son premier vol en 1982…

… et qui a été certifié en 1984, drôle de calcul.

Néanmoins, le nouveau C208 EX, qui devrait être présenté lors du prochain Salon du Bourget, permet de rappeler qu’au delà des monomoteurs à pistons et des jets d’affaires, Cessna s’est lancé avec bonheur dans la catégorie des avions utilitaires avec ce monoturbine bon à tout faire, digne successeur du Beaver !

Capable de se poser vraiment n’importe où, même sur l’eau pour peu qu’on le dote de ses flotteurs EDO, aménagé façon commuteur haute densité ou bien en salon VIP confortable, le Caravan n’est pas un avion très rapide (encore qu’avec ses 170 kt, il n’est pas vraiment ridicule) mais c’est une vraie Jeep du ciel avec une charge utile importante et des coûts d’exploitation raisonnables.

DSC_8983Bien sûr, 2500 exemplaires et plus, c’est bien peu pour Cessna si on compare avec la production des monomoteurs à pistons comme l’incontournable C172, mais si on compare avec les rares appareils de ce segment (Quest Kodiak, PAC P-750, mais aussi, dans une moindre mesure TBM 900 et PC-12), il est un vrai succès commercial encore plein d’avenir. Mais il est vrai que cette catégorie d’avions « utilitaires » ne capte pas vraiment les feux de l’actualité et ces appareils souffrent réellement d’un déficit de notoriété particulièrement injuste. Caravan I

Si vous avez envie d’en savoir plus, n’hésitez pas à vous procurer ce livre :CARAVAN_book
http://www.asa2fly.com/Caravan-Cessnas-Swiss-Army-Knife-with-Wings–P1051.aspx
Histoire de l’avion, conseils aux pilotes et exploitants, expériences vécues, c’est une véritable petite encyclopédie pratique vivante dense, passionnante…. et peu onéreuse.

En attendant, Cessna propose à ceux qui ont un souvenir particulier à partager sur cet avion à donner leur témoignage ici :

http://txtav.force.com/caravan30

Alors, un vol un peu chaud entre St Martin et St Barth, une arrivée féérique sur l’ïle d’Ouessant, un amerrissage au paradis en Alaska, racontez !

J’ai eu le plaisir de voler une paire d’heures comme passager à bord de cet avion, et j’ai bon espoir de pouvoir un jour le piloter, il fait vraiment partie des « avions sympas »…